Batteur des Roots, un des meilleurs groupes de hip-hop au monde, autorité absolue en matière de culture musicale, QuestLove signe un réjouissant et nécessaire documentaire consacré à un festival ayant réuni en 1969 les plus grandes figures de la soul américaine.

Un an d&eacute;j&agrave; que Martin Luther King et Robert F. Kennedy ont &eacute;t&eacute; assassin&eacute;s. Alors que l&rsquo;Am&eacute;rique r&ecirc;ve d&rsquo;exploits spatiaux, riv&eacute;e devant sa t&eacute;l&eacute;vision en regardant les astronautes men&eacute;s par Neil Armstrong alunir, pour oublier que la guerre du Vietnam s&rsquo;&eacute;ternise dans le sang et le deuil, un extraordinaire festival, gratuit, r&eacute;unit cet &eacute;t&eacute; 1969, pendant six week-ends cons&eacute;cutifs, devant 300 000 personnes, durant le Harlem Cultural Festival, le meilleur de la cr&eacute;ation musicale du moment : Stevie Wonder, Mavis Staples, <a href="https://www.lofficiel.be/art-culture/nina-simone-en-10-citations-incontournables" target="_blank">Nina Simone</a>, The 5th Dimension, The Chambers Brothers, Gladys Knight &amp; The Pips, Sly &amp; The Family Stone, B.B. King, Max Roach et Abbey Lincoln&hellip;Si tous ces concerts ont &eacute;t&eacute; film&eacute;s, les images, sur une quarantaine d&rsquo;heures capt&eacute;es, n&rsquo;avaient &eacute;t&eacute; que tr&egrave;s partiellement diffus&eacute;es.

Oubli&eacute;es, par n&eacute;gligence, ou volont&eacute; politique de ne pas offrir trop d&rsquo;exposition &agrave; des artistes afro-am&eacute;ricains ? Alors que leur communaut&eacute; peine encore &agrave; faire entendre sa voix et valoir ses droits - les dispositifs s&eacute;gr&eacute;gationnistes ne sont pas un lointain souvenir, beaucoup des spectateurs-trices et des artistes pr&eacute;sent-e-s en ont souffert - il n&rsquo;est pas interdit, comme le souligne le sous-titre du documentaire, &quot;&hellip;ou quand la r&eacute;volution n&#39;a pas pu &ecirc;tre t&eacute;l&eacute;vis&eacute;e&quot;, de penser que leur disparition n&rsquo;est pas anodine. La m&ecirc;me ann&eacute;e se tenait le&nbsp;festival de Woodstock&nbsp;- que l&rsquo;attention se soit plut&ocirc;t port&eacute;e sur une manifestation moins charg&eacute;e de revendications est lourd de sens. Emprunt&eacute;e en r&eacute;f&eacute;rence &agrave; une sublime chanson de Gil Scott-Heron,&nbsp;The Revolution Will Not Be Televised, cette pr&eacute;cision est &eacute;loquente. On imagine la stupeur de QuestLove en d&eacute;couvrant ces sc&egrave;nes o&ugrave; rayonne le g&eacute;nie humain universel - on la partage, tant elles semblent bondir hors du t&eacute;l&eacute;viseur, intens&eacute;ment vivantes, aux vibrations sensuelles intactes, &agrave; la rage toujours mordante.

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M&ecirc;lant avec habilet&eacute;&nbsp;s&eacute;quences musicales, entretiens pertinents et p&eacute;dagogie ludique, le musicien a r&eacute;alis&eacute; un v&eacute;ritable travail de cin&eacute;aste, proche de la d&eacute;marche du ma&icirc;tre en la mati&egrave;re de documentaires, Ken Burns, partageant le m&ecirc;me souci d&rsquo;offrir &agrave; la musique &agrave; la fois un &eacute;crin sur mesure valorisant sa valeur intrins&egrave;que, mettant en lumi&egrave;re son identit&eacute;, &eacute;clairant son histoire, sans faire l&rsquo;&eacute;conomie de l&rsquo;exploration de son arri&egrave;re plan prosa&iuml;que, captant avec pr&eacute;cision ce changement de paradigmes culturels et sociaux. Il brosse ici un tableau tout en reliefs saisissants, chatoyants, d&eacute;tails touchants, o&ugrave; se s&rsquo;&eacute;treignent amoureusement la joie pure de la musique et la conscience politique, balayant toute la palette chromatique des &eacute;motions humaines.&nbsp;

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Summer of Soul&nbsp;est aussi r&eacute;jouissant qu&rsquo;instructif, autant spectaculaire qu&#39;&eacute;mouvant - on d&eacute;fie quiconque de ne pas &ecirc;tre boulevers&eacute;-e par l&rsquo;interpr&eacute;tation du classique du r&eacute;pertoire gospel,&nbsp;Take My Hand, Precious Lord, par Mavis Staples et Mahalia Jackson. Transcendant la notion m&ecirc;me de foi, cet hymne parle, aussi, du pouvoir consolateur et r&eacute;dempteur de la musique. Ce film est pr&eacute;cis&eacute;ment un &eacute;loge br&ucirc;lant de la puissance d&rsquo;un geste cr&eacute;atif d&eacute;passant sa vocation divertissante pour nous (r&eacute;)apprendre qu&rsquo;il peut s&rsquo;assigner bien d&rsquo;autres missions. A chacun-e d&rsquo;en tirer un enseignement. &quot;How beautiful it was&quot;&nbsp;dit le t&eacute;moignage sur lequel le film s&#39;ach&egrave;ve. On ne saurait mieux dire - si ce n&#39;est d&#39;ajouter que cette beaut&eacute; &eacute;clatante se conjugue encore au pr&eacute;sent et au futur. Il suffit de tendre l&#39;oreille, une oreille attentive et reconnaissante.&nbsp;&nbsp;

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&quot;Summer of Love&nbsp;(ou quand la r&eacute;volution n&#39;a pas pu &ecirc;tre t&eacute;l&eacute;vis&eacute;e)&quot;, un film r&eacute;alis&eacute; par Ahmir &quot;Questlove&quot; Thompson,&nbsp;sur Disney+ &agrave; partir du 30 juillet 2021.&nbsp;

"Summer of Soul", le plus beau documentaire de l’été ?

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